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La fillette de la piscine

Dans la vie, il nous arrive parfois des choses extraordinaires.

 

   

       D'un seul coup, on prend conscience qu'on vit un  moment magique et tout ce qu'on croyait avoir compris dans la vie, bascule en un instant.

 

 Un instant hors du temps.

 

  Pour Laura la fillette de la piscine.

 

Dans son maillot de bain  d’un rose éclatant,

C’était une fillette  on lui donnait treize ans,

Son corps dégingandé  d’une maigreur extrême,

Semblait  prêt à  casser, à la fois grand et blême.

 

Quand elle est arrivée  au bord de la piscine,

Avec ses gestes heurtés  et ses mains toutes fines

On ne voyait plus qu’elle et son visage à frange                           

A changé l’atmosphère  d’une façon étrange.

 

On dit handicapés, et on parle d’un manque                                   Manque de normalité et corps de saltimbanque                             

On ne parle jamais  de ce qui les grandit                                       

Ressentir au plus fort tout ce qui fait leur vie.

 

Elle se faisait petite, se recroquevillait

Attendant que quelqu’un  la prenne par la main,

Elle se sentait bien seule et s’effrayait d’un rien

Et tous ses petits cris  peu à peu l’apaisaient.

 

Et quand elle est entrée  dans la grande piscine

Que dans ses yeux brillaient  l’envie, la peur, l’envie

On a senti enfin cette joie qu’on devine 

Aux sourires et aux cris  qui lui redonnaient vie

 

On se croit supérieur car est dans la norme

Mais quand on les côtoie ce sont eux qui nous transforment

On voit que toutes nos normes sont bien artificielles,

Leurs vies sont différentes  et pourquoi pas  plus belles.

 

Quand elle s’est emparée du grand rond tout en mousse

On a senti en elle  toutes les joies du  monde.

Elle était là, dans l’eau,  et à chaque seconde

 Elle n’avait plus besoin  qu’on vienne à sa rescousse.

 

 

 

L’éducatrice au loin lui parlait que par signe

Elle comprenait tout, tout  ce qu’on lui disait

Elle ne pouvait répondre  à toutes les consignes

Car ses gestes imprécis  bloquaient toute sa pensée.

 

On dit handicapés, et on parle d’un manque                                   Manque de normalité et corps de saltimbanque                             

On ne parle jamais  de ce qui les grandit                                       

Ressentir au plus fort  tout ce qui fait leur vie.

 

Quand elle a réussi  à s’asseoir sur le rond

Qu’elle a croisé les jambes  tout comme un bouddha

Elle semblait une grenouille qui aurait sauté d’un bond

Sur la feuille bien verte  d’un très grand nénuphar.

 

Elle n’était plus que joie,  plus qu’allégresse intime

Elle avait dominé  le monde autour d’elle

Cette eau qui faisait peur, cette eau toute nouvelle

Elle l’avait  adoptée  comme  bonheur ultime

 

On dit handicapés, et on parle d’un manque                                   Manque de normalité et corps de saltimbanque                             

On ne parle jamais  de ce qui les grandit                                       

Ressentir au plus fort  tout ce qui fait leur vie.

 

 

Toutes ces sensations  qu’elle savait ressentir

J’aimerai moi aussi  savoir  les éprouver

N’être que sentiment  de joie et de plaisir

N’être qu’un corps dans l’eau, savoir tout oublier.

La fillette de la piscinePatrick Burgués
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