En arrivant sur le palier, je vis tout de suite qu’elle était entrouverte. Je la poussai précautionneusement et j’entrai dans une toute petite pièce sombre avec une minuscule fenêtre fermée. Au centre, il y avait une grande parabole blanche qu’on distinguait à peine. Tout était silencieux. Devant la parabole, deux boutons, un rouge à droite et un vert à gauche éclairaient discrètement l’endroit. Entre les deux, une manette de jeux. Je m’approchai et je la fis bouger dans tous les sens, mais rien ne se passa. Je finis par appuyer sur le bouton vert et j’entendis aussitôt distinctement les bruits de la ville comme si, tout à coup, une fenêtre s’ouvrait. Il y avait un contraste saisissant entre la toute petite pièce sombre et fermée sur elle même et les bruits énormes et variés : sirène des ambulances, bruits de moto, démarrages des voitures et ce brouhaha incessant, comme une ruche qu’on vient de déranger.
Soudain, quatre petites leds vertes se mirent à clignoter autour de la manette de jeux. Je poussai celle-ci vers la droite et le bruit se fit moins intense. Je me baladai ainsi un moment, écoutant des bruits d’intensités et d’origines différentes. Puis je poussai la manette vers l’avant et là, les bruits de la ville diminuèrent et j’entendis, au loin une conversation. J’enfonçai complètement la manette et je compris nettement que deux hommes parlaient de la stratégie commerciale de leur entreprise. Juste à ce moment là, le deuxième bouton passa au vert. Curieux j’appuyai dessus et aussitôt une lumière jaillit et dans la pénombre, sur la parabole éclairée violemment, apparut le visage des deux hommes qui discutaient. Je revins en arrière avec la manette et je vis que ces deux hommes étaient sur la terrasse d’un grand bâtiment au milieu d’un petit jardin avec des arbustes. Ils étaient vêtus d’un costume et tenaient dans leur main un attaché case. En regardant les bâtiments autour, j’en déduisis qu’ils devaient être en haut de l’hôtel le plus réputé de la ville, le Régent. Je bougeai la manette dans tous les sens et c’est toute la ville que je pus découvrir sur la parabole. Je regardais en détails les toits des maisons que d’habitude on ne voit pas quand on se balade. J’entrais par le haut dans l’intimité de la ville et des gens. En me déplaçant de plus en plus vers la gauche, je finis par arriver sur la forêt que j’avais vue, le premier jour, par la drôle de fenêtre en forme de trou de serrure. C’était magique, j’étais dans la ville comme un spectateur et je passai tout l’après midi à voir et à écouter.
Plein de tous ces morceaux de vie, je redescendis. Quand je revins le lendemain après midi, la porte était encore entrouverte.